O-France 2018 : de bonnes intentions pour une mauvaise communication

Du 7 au 14 juillet 2018, j’ai participé, en tant que concurrent, au O-France 2018, dans les Vosges-Mosellanes. D’ordinaire, je n’ai pas pour habitude de vous raconter ma vie sur ce site. Mais je vais vous parler cette fois de la production de quelqu’un d’autre. Spoiler : pas pour en dire du bien !

O-France 2018 : Alina Niggli

 

Des photos pour votre événement sportif

Les O-France 2018 était une compétition de course d’orientation, avec environ 1 500 participants durant 6 jours. Jusque là, peu de rapport entre l’activité de 6×7 et mes pratiques sportives personnelles, me direz-vous ? Oui mais les organisateurs ont eu l’idée de proposer des galeries photos des épreuves sur leur site internet – une idée qui aurait pu être excellente…

Mais voilà, il est probable que les organisateurs de l’édition 2018 avaient bien d’autres soucis que la publication web – il a donc manqué un travail minimum d’édition entre la prise de vue et la mise en ligne. Premier échec critique, comme disent les amateurs de jeu de rôle.

De plus, la structure web utilisée pour la mise en ligne des informations des O-France successifs (ces épreuves existent depuis 2016) est franchement inadaptée aux technologies de 2018, que ce soit en raison de choix initiaux inadaptés ou par manque de mises à jour. Game over !

La technique nous trahit
(Quelques notions techniques simples pour mieux apprécier la qualité d’un site internet)

Parlons un peu technique : le site des O-France est géré avec WordPress. Ce choix me semble parfaitement adapté pour ce type d’événement, c’est celui que je propose par défaut pour la gestion des sites associatifs ou communautaires, entre autres.

Pour les moins techniciens des lecteurs : Worpress est un système de gestion de contenu, qui assure donc la gestion du contenu du site internet, textes, images, etc. – mais l’apparence de ce contenu dans votre navigateur dépend d’un « thème » ajouté à WordPress. Ce thème détermine tout les aspects visuels en dehors du contenu lui-même : choix des caractères, couleurs, éventuellement images ou couleur de fond – et aussi adaptation de l’affichage à la taille de l’écran de votre appareil, ce que l’on nomme « responsive design« . Gros avantage : le jour où vous souhaitez refaire la devanture de la boutique, pas besoin de refaire l’intérieur… Le contenu du site utilisera automatiquement une nouvelle présentation dès le moment où un nouveau thème sera activé.

La dette technique : le choix initial se paye plus tard

Revenons au site o-france.fr : il utilise un thème personnalisé, créé il y a probablement trop longtemps, qui présente des problèmes majeurs de non-compatibilité avec les navigateurs actuels – en particulier sur mobile.
Les ennuis commencent dès la page d’accueil, avec une image qui sert de menu de navigation : essayez donc de cliquer au bon endroit sur un écran de 6 pouces (ou moins) de diagonale, avec des zones cliquables qui se superposent…

O-France 2018 page d'accueil inutilisable sur téléphone mobile
page d’accueil sur iphone SE
O-France 2018 : page d'accueil sur grand écran
page d’accueil sur grand écran

 

Dans la série des obsolescences, le site est toujours en http, le protocole de communication non-sécurisé du web – alors que tous les sites actuels se tournent vers le https, aussi simple à utiliser pour le visiteur mais qui assure que toutes les données transmises sont cryptées.

Je citerai encore le plugin qui affiche la météo sur certaines pages, mais qui masque une partie du menu de navigation car il « flotte » au premier plan, par dessus les lignes de menu qui se déroulent.

Manifestement, il n’y a plus de développeur à l’autre bout de la ligne. D’ailleurs, le site du créateur de thème semble aujourd’hui inaccessible (source : http://www.o-france.fr/2018-foot/wp-content/themes/ofrance/style.css?ver=1.0).

Deux leçons pour un site internet durable

Je ne sais pas si la faute vient des exigences du client, ou des compétences du développeur, ou de la déshérence technique du site, mais il y a là deux leçons à retenir :

Il est très intéressant d’utiliser un thème personnalisé, pour avoir un site à l’aspect unique – mais il est préférable de choisir un thème reconnu, gratuit ou payant, et de l’utiliser par le biais d’un « thème-enfant ». Le principe est d’utiliser le thème principal avec toutes ses fonctionnalités, et d’en redéfinir seulement quelques aspects ou quelques fonctions.
Les thèmes wordpress populaires sont fréquemment mis à jour pour s’adapter aux évolutions technologiques de nos appareils, ou corriger des erreurs découvertes au sein de leur large base d’utilisateurs – mais les modifications apportées par le thème enfant sont préservées lors des mises à jour.

Deuxième leçon : le client devrait écouter les conseils des développeurs (je sais, c’est un rêve lointain… dans le genre, voir https://www.webagencyfail.com/)

Parlons (presque) photo

Après ce trop long intermède sur la technique globale des sites internet, parlons photo. Les organisateurs des O-France 2018 ont donc eu la très bonne idée de proposer des galeries de photos de chaque épreuve. Malheureusement, ces fameuses galeries sont affectées des mêmes défauts techniques que l’ensemble du site :

Galerie photo de O-France 2018

Selon votre appareil, votre système d’exploitation, la taille de votre écran, vous n’aurez pas forcément la même « vision d’horreur ». Sachez donc que selon les cas, les images verticales peuvent apparaitre couchées – ou bien verticales mais déformées pour remplir l’espace comme si elles étaient horizontales.

Si le site utilise correctement une « fancy-box » (fenêtre qui vient se superposer au site lorsque vous cliquer sur une image, pour l’afficher en grand format), l’image reste mal orientée ou déformée. La fête !

Mais il y a plus encore, en l’occurence, un défaut spécifique à la pratique de la photographie.

Parlons (enfin) photo

Prendre des photos est devenu une pratique accessible à tous et à chacun. Le téléphone surgit de la poche s’il n’est pas encore en main, et snap!, l’image est déjà sur les réseaux sociaux. On peut ajouter des masques, des filtres, et envoyer sa photo du paradis sur terre vers instagram, pour faire envie à ses voisins. Au passage du tour de France, sur le bord de piste ou au détour du sentier du trail, on photographie le coureur et on poste l’image dans la foulée – c’est le scoop universel. Les plus fortiches feront même un selfie avec le sportif – histoire de se mettre à la même hauteur.

Vous me sentez désagréable ou énervé ? Vous avez parfaitement raison. Mais ce n’est pas à cause de l’usage du téléphone comme appareil, je le fais moi aussi lorsque je n’ai rien d’autre sous la main. Et même pas parce que je n’ai aucune raison qui justifierait ma présence à l’image – donc exit le selfie : je sors mon appareil pour transmettre l’image de l’événement en cours, pas pour me mettre en scène devant le monument.

selfie devant la fontaine de Trévise, Rome
Une autre conception de la photo

 

La taille de la poubelle

Le vrai sujet de mon énervement, c’est la sélection des images. Je répète souvent qu’à l’époque de la photographie argentique, la différence entre le photographe professionnel et l’amateur, c’était la taille de la poubelle.

Parfois, lorsqu’une image est suffisamment bonne pour y échapper, on l’observe attentivement, on l’améliore dans Adobe Lightroom comme on le faisait au 20ème siècle dans son laboratoire photo, et alors seulement on publie… Evidemment, cela nécessite un certain temps – voir un temps certain : pour une heure de prise de vue, je compte au minimum une heure de tri et de retouche – et au minimum trois quart des images qui sont passées directement à la poubelle. Mais ça peut-être beaucoup plus, autant pour la proportion de déchets que pour le temps passé.

Du coup, quand je consulte les galeries des O-France 2018 (péniblement, vu les problèmes techniques évoqués précédemment), j’ai un grand sentiment de désespoir. Pris au hasard :

Deux conseils pour conclure

Premier conseil gratuit : je crois avoir été clair, apprenez à jeter ! Quand c’est raté, c’est raté, il n’y a plus rien à faire. N’aggravez pas votre cas en montrant à tout le monde que vous l’avez vraiment bien raté…

Je ne réussis évidemment pas toutes les images que j’essaie de prendre – je ne m’en vante pas en les montrant à tout le monde, je les supprime et j’essaie juste de m’en rappeler pour les réussir la prochaine fois.

Deuxième conseil – payant : faites appel à un photographe – et sinon, consacrez un poste dans votre organigramme à un éditeur pour le contenu web, graphiste de préférence, qui assurera la sélection et les retouches sur les images produites par les photographes amateurs répartis dans votre organisation.

Photographe ou éditeur web, dans les deux cas il y a un coût, financier ou en ressources humaines, mais votre communication se situera à un niveau de qualité et de crédibilité digne des efforts que vous faites pour réussir par ailleurs.

Pour vous faire une idée personnelle, vous pouvez jeter un oeil aux images que j’ai prises durant les O-France 2018, forcément peu nombreuses puisque j’ai passé la majeure partie de mon temps à courir plutôt qu’à photographier des gens qui courent… Vous l’avez compris, il n’y a que les photos réussies, soit moins de 60 sur à peu près 400 images prises entre le 9 et le 14 juillet 2018. Et comparez avec la galerie du site officiel…
Galerie 6×7

Galerie O-France 2018